Le bleu des abeilles

Publié le 14 octobre 2013, par Sylvie Hendrickx


Une enfant découvre la langue française à travers le prisme fascinant du voyage et de l’inconnu.

ALCOBA Laura, Le bleu des abeilles, Gallimard, 2013

A 8 ans, Laura, petite fille de La Plata en Argentine commence son apprentissage du français sous le signe d’une grande impatience : un départ l’attend, pour Paris, ville des lumières, où sa mère s’est réfugiée après le coup d’état militaire et les évènements de 1976. Mais l’attente sera longue, des mois, deux ans… Entre un manuel d’apprentissage où tous les chiens de France s’appellent Médor et la découverte émerveillée de sons inouïs, jamais imaginé jusqu’alors, Laura développe un véritable amour pour cette langue, promesse d’un voyage sans cesse postposé et de retrouvailles à venir.
Mais lorsqu’en janvier 1979, la petite argentine débarque enfin de l’autre côté de l’océan, elle découvre dans la cité de Blanc-Mesnil un appartement sombre et étriqué, bien éloigné de l’image parisienne flamboyante qu’elle s’était forgée. Les débuts à l’école française sont difficiles et son malaise persiste face à cet accent qui déclenche immanquablement chez son interlocuteur condescendance ou curiosité. Pour y remédier, l’enfant s’entraîne sans relâche devant son miroir, formant des « u » et des « s » qui grésillent entre deux voyelles. Elle se plonge aussi dans la lecture. Des Fleurs bleues de Raymond Queneau à La vie des abeilles de Maurice Maeterlinck, elle ne saisit rien ou si peu, que cette musicalité fabuleuse de nasales qui lui chatouillent le nez, et la magie de ces voyelles muettes embusquées à chaque phrase.
Dans cette chronique autobiographique fraîche et pleine de candeur, Laura Alcoba partage avec bienveillance et malice son regard et ces croyances d’enfant. Elle relate, au fil de ses expériences, la naissance et l’épanouissement d’une solide complicité avec cette facétieuse et surprenante langue française.