L’Apeirogon

Publié le 15 janvier, par Valérie Detry


Mc Cann Colum, L’Apeirogon , Ed. Belfond, 2020

L’énigmatique Apeirogon dévoile par fragments, à l’image de la figure géométrique au nombre infini de côtés qu’il déploie, la réalité multifacette du tragique conflit israélo-palestinien. Entre fiction et réalité, ce récit brûlant d’actualité, prix du meilleur roman littéraire étranger, est percutant comme une bombe. Mais également nuancé, profondément humain, sensible et empathique, il insuffle un espoir de paix à travers la rencontre improbable de deux frères de chagrins que tout devait pourtant opposer, mais unis par le destin. Rami, ancien soldat israélien reconverti dans le graphisme et Bassam, militant palestinien ne partagent qu’un seul point commun : celui d’avoir perdu leur fille, l’un d’une balle perdue, l’autre dans un attentat kamikaze. C’est dans un Cercle de parents israéliens et palestiniens endeuillés que ces deux pères relèveront la tête et décideront de co-fonder les « Combattants pour la paix », parcourant le monde entier pour porter leur témoignage. La construction atypique du récit de l’ancien journaliste et écrivain irlandais récompensé à plusieurs reprises, Colum Mc Cann, surprend d’emblée. Il explose sa matière en 1001 sections narratives se baladant librement à travers l’espace et le temps. Au cœur de l’histoire, l’auteur disparait pour laisser place aux paroles de Rami et Bassam, par l’intermédiaire d’interviews. Chaque touche est un coup au cœur révélant les 1001 violences de la vie quotidienne en Cisjordanie sans prise de parti, juste en transcrivant la complexité du chaos. L’Apeirogon est un roman marquant, singulier, instructif et nécessaire par les temps qui courent. Juste et riche, il unit fond et forme pour laisser entendre cet appel à la paix.