Avec Victoire Dunker, chargée de communication pour Bibliothèques Sans Frontières Belgique

Publié le 23 juin 2022, par Sylvie Hendrickx


Dans les situations d’urgence humanitaire, l’accès à l’information constitue, aux côtés des besoins primaires, un enjeu majeur. Dans cette optique et suite aux déplacements massifs de population consécutifs à la guerre en Ukraine, Bibliothèques Sans Frontières se mobilise afin d’informer et d’accompagner la reconstruction psychologique des réfugiés tout en veillant à leur intégration dans les différents pays européens et ce, par le biais de bibliothèques d’urgence et d’activités culturelles. Victoire Dunker, chargée de communication, déploie pour nous le vaste plan « Urgence Ukraine » mis en place par cette association.

S.H. Dès les premiers jours du conflit, BSF s’est mobilisé pour venir en aide en urgence aux populations. Quelles étaient les mesures mises en place ?

V.D. Notre priorité était de mettre en place des espaces sécurisés d’information et de protection par l’intermédiaire de 10 « Ideas Box ». En effet, les personnes réfugiées qui atteignent les centres de transit une fois passée la frontière ukrainienne, y arrivent généralement dans un état d’épuisement et de stress notable. Cet état de choc, cumulé à la prolifération de rumeurs et fausses nouvelles circulant dans ce genre de contextes, rend ces personnes particulièrement vulnérables, à un moment où celles-ci doivent prendre des décisions cruciales pour la suite de leur périple : dans quelle région ou pays aller, vers quelle organisation se tourner…

S.H. Concrètement, comment cela fonctionne-t-il ?

V.D. Les « Ideas Box » disposent d’un accueil pour les enfants et leur mère avec des activités de soutien culturelles et ludiques pour faciliter la reconstruction psychologique. Elles proposent également l’accès à internet, à des tablettes et à des bornes de recharge de téléphones pour reprendre contact avec les proches. Ce sont en outre des lieux d’accès à des informations fiables sur les modalités de demande d’asile en Europe et les conditions de transit et d’accueil. A moyen terme, ces dispositifs donnent enfin accès à des ressources pédagogiques et d’autoformation pour faciliter l’apprentissage de nouvelles langues ou la continuité éducative pour les enfants. Ces « Ideas Box » sont déployées à la frontière ukrainienne, notamment en Pologne et en Moldavie.

S.H. Votre plan prévoit également l’installation de bibliothèques d’urgence dans les centres d’accueil de différents pays européens…

V.D. En effet, à ce stade, 7 bibliothèques d’urgence ont été déployées par le réseau Bibliothèques Sans Frontières en Europe, à savoir BSF France, BSF Belgique, BSF Italie et BSF Suisse. Ces bibliothèques visent à contribuer à la reconstruction psychologique et l’apprentissage de la langue. Elles sont constituées de livres, de jeux et d’un kit multimédia (connexion internet et tablettes). Elles sont un lieu de détente, un sas de décompression, d’accès à l’information et un premier pas vers la découverte du pays d’accueil.

S.H. Qu’en est-il en Belgique précisément ?

V.D. En Belgique, nous prévoyons de déployer plusieurs bibliothèques d’urgence réparties entre Bruxelles, la Wallonie et la Flandre. Sur place, un coordinateur et un formateur de BSF assureront la formation du personnel des centres d’accueil et des bénévoles pour les aider à organiser des animations autour de l’espace créé. Ces bibliothèques n’ont pas pour vocation de se substituer aux bibliothèques publiques déjà existantes en Belgique, mais au contraire de créer un pont entre celles-ci et les populations réfugiées.

S.H. Une enquête initiée par BSF afin d’évaluer les besoins de ces population est également en cours chez nous…

V.D. En effet et celle-ci est capitale car les réponses obtenues vont nous permettre de mieux cerner leurs besoins et leurs attentes en matière d’informations. Le but est évidemment, à long terme, de pouvoir faciliter l’intégration tant des enfants dans les écoles que des adultes sur le marché de l’emploi et ce, par l’apprentissage de la langue. Dans cette optique, notre plan d’action a d’ores et déjà pour objectif la mise en place d’un programme de tutorat ainsi que le développement d’une application mobile visant l’apprentissage du français au départ de l’ukrainien et du russe, et basée sur la technologie “Kajou”.

S.H. L’ensemble de ce plan se base sur l’importante expérience de BSF et s’intègre dans les objectifs globaux de votre association…

V.D. Depuis sa création en 2007, BSF travaille dans plus de 30 pays, dont la Belgique, pour protéger les populations vulnérables en leur facilitant l’accès à l’information, à l’éducation et à la culture. Nous voulons donner à chaque personne la chance d’être un citoyen épanoui et autonome, équipé face aux grands enjeux qui constitue le monde d’aujourd’hui : l’alphabétisation, la littératie numérique, la santé, l’emploi, etc. Dans les situations d’urgence comme la crise ukrainienne, nous déployons des solutions en coordination avec la communauté humanitaire en formant les acteurs de terrain et en développant des outils innovants dans plus de 25 langues différentes, et ce afin de permettre à ces population de continuer à s’informer, se divertir et s’émanciper. Des jeunes réfugiés rohingyas au Bangladesh aux enfants des rues burundais, des adolescents des quartiers nord de Marseille aux usagers des laveries automatiques aux États-Unis, nous avons contribué à changer la vie de plus de 1,5 million de personnes.

Comment participer au plan d’action de BSF en faveur des réfugiés ukrainiens en Belgique ?

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