Le mur invisible

Publié le 17 décembre 2020, par Sylvie Hendrickx


Un bouleversant roman survivaliste aux dimensions écologistes et féministes.

HAUSHOFER Marlen, Le mur invisible, Babel, 1992

Grand classique de la littérature publié en 1963, cette œuvre la plus célèbre de l’autrichienne Marlen Haushofer est devenue l’archétype du roman survivaliste au féminin ! Elle relate, sous forme de journal intime, une expérience-limite tout à fait particulière à laquelle est confrontée une femme ordinaire. Cette narratrice quadragénaire, dont nous ne connaîtrons pas le nom, est venue se ressourcer dans un chalet de montagne avec des amis. Un matin, alors que ceux-ci ne sont pas rentrés du village, elle se découvre avec effroi coupée du reste du monde par un mystérieux phénomène : un mur invisible et infranchissable, au-delà duquel toute vie semble figée. Commence alors pour cette citadine, confinée dans des alpages qui lui sont étrangers, une lutte pour la survie faite de dur labeur et de solitude. Cette dernière est uniquement atténuée par la présence d’animaux avec lesquels elle tisse des liens forts, faisant naitre une responsabilité envers eux qui l’oblige à rester debout malgré les épreuves. Formidable hymne à la résilience, ce roman n’a rien perdu de sa force percutante ! Il continue à nous toucher par sa portée universelle ainsi que par la modernité de ses dimensions écologistes et féministes. En effet, avec la puissance de son écriture limpide et poétique, l’auteure nous livre une ode à la nature, dans toute sa rudesse mais aussi sa générosité, source de contemplations infinies et finalement de liberté ! De fait, alors que nous suivons l’intégration laborieuse de l’héroïne à cet environnement naturel, nous découvrons aussi le récit bouleversant de son émancipation personnelle, loin du regard aliénant de la société patriarcale : « J’avais acquis le droit d’oublier ma condition. Parfois j’étais une enfant qui cherchait des fraises, puis un jeune homme qui sciait du bois »… Engagé, ce chef-d’œuvre inoubliable nous ramène ainsi aux fondements même de notre humanité, qui révèle sa pleine mesure dans ses liens profonds avec la nature !