La bibliothèque des « Dames de Marie » à Schaerbeek

Publié le 6 janvier 2013, par Françoise Vanesse


Pousser les portes de cette bibliothèque, c’est découvrir…

Un endroit magique

Certaines écoles renferment en leur sein des bibliothèques dignes de ce nom. Leurs noms divergent : tantôt « Centre de documentation », « BCD », ou, tout simplement, « bibliothèques des élèves » ! Comment dire en effet puisqu’il n’existe pas de classification officielle dans le domaine, pas d’exigence décrétale non plus et, de surcroît, aucun répertoire en Communauté française…
Le tout est question du volontarisme en la matière du pouvoir organisateur...
Le tout est aussi de dénicher la perle rare !
La bibliothèque des « Dames de Marie » à Schaerbeek fait figure précisément de ces endroits un peu magiques, que l’on aime dénicher et qui, une fois que vous l’avez visitée, vous font oublier les bibliothèques d’écoles un peu maussades, les « coins-lecture » moribonds que vous auriez pu croiser au cours de votre vie…
Ici, nous voici dans une autre dimension… Car cette bibliothèque est née de la volonté d’un pouvoir organisateur désireux d’offrir à ses élèves (en majorité d’origine étrangère), un centre de documentation digne de ce début du XXème siècle qui, de plus, serait logé dans un endroit à haute valeur patrimoniale !

Un double projet

C’est en 1999, en effet, qu’a débuté ce vaste projet dont les objectifs étaient doubles. « Premièrement, explique Fabienne Beckers, enseignante, la bibliothèque de l’école était hébergée dans des locaux qui n’étaient pas réellement conçus à cet effet. Et, d’autre part, nous avions l’opportunité de proposer un plan de rénovation et de restauration de la belle chapelle néo-gothique située dans la partie ancienne de notre école. Nous avons donc décidé de rassembler cette double motivation en une et de transformer cette chapelle en une bibliothèque accueillante, performante et conforme, tant au niveau architectural que bibliothéconomique, aux attentes de nos élèves et des enseignants ».

Une chapelle rénovée

C’est ainsi que débutent, en 1999, les travaux de restauration et d’aménagement de l’ancienne chapelle néo-gothique datant de 1874 et classée aux Monuments et Sites. Après quatre années de travaux et un chantier d’importance, la nouvelle bibliothèque ouvre ses portes aux élèves au début de l’année scolaire 2004-2005.
Et le résultat est surprenant. Premièrement, sur le plan architectural. Les concepteurs du projet ont en effet relevé le défit d’aménager, à partir d’un espace unique, plusieurs lieux de vie voués à la recherche et la lecture. De plus, ils sont également parvenus à conjuguer un sentiment de quiétude avec une importante impression de rythme, de vie, de lumière et de modernité.

De la modernité et de l’accueil

Lorsque vous pénétrez au rez-de-chaussée, une première plage s’étend devant vous. Vous voici au cœur de la nef centrale meublée de tables et de chaises : le tout sur un parquet marqueté et classé datant de 1912 et entièrement restauré. Des étagères de bois clair, assorties aux tables, bordent ce premier îlot.
Si vous vous dirigez vers le chœur de l’ancienne chapelle, vous empruntez un bel escalier hélicoïdal qui vous conduit à la mezzanine soutenue par un imposant portique de métal bleu vif. Vous vous trouvez dans l’espace qui abrite six ordinateurs à la disposition des élèves. L’endroit est propice à la recherche : aérien, agréable, avec vue sur l’ailleurs grâce aux connexions internet mais aussi grâce aux percées des superbes fenêtres ogivales constituées de fragments des anciens vitraux classés eux aussi et côtoyés par d’élégants pilastres. En arrière-fond, la rosace veille sur vous, tel un phare pour vous guider sur les flots où vous surfez !
Mais là ne s’arrêtent pas les atouts de cette bibliothèque qui possède également dans l’ancien chœur de la chapelle une chambre obscure et un local vidéo, parfaitement insonorisés, et dans lesquels des projections ont lieu.

Des collections

La bibliothèque organisée selon la C.D.U. compte plus ou moins cinq mille ouvrages. Une grande part est réservée à la littérature avec une attention particulière pour le rayon « Jeunesse » qui ne cesse de se développer. Au niveau « classifiés », une part importante est réservée à l’histoire et l’histoire de l’art car l’école possède une section artistique. « Quant au rayon « science », nous devons l’améliorer », conclut Fabienne Beckers qui gère le stock et les achats.
La bibliothèque accueille les élèves tous les midis, et pendant leurs heures de fourche.
La permanence est assurée par Fabienne Beckers, enseignante détachée qui dispose de dix-huit heures pour la gestion des livres et leur encodage. Celle-ci est aidée par sa collègue pour six heures et reçoit de l’aide pendant le temps de midi.
De plus, des élèves gèrent leur bibliothèque. Ainsi des étudiantes de 5ème et 6ème se portent volontaires pour l’accueil, la préparation et le rangement des livres.
Le catalogue « GIBRE « est informatisé : plus de 5000 ouvrages y sont repris.
Les journaux sont consultables sur place. 80 % des élèves sont inscrits et fréquentent régulièrement la bibliothèque.

Des animations et des passerelles

L’école dispose de la collaboration d’une animatrice engagée il y a quelques années dans le cadre d’un vaste projet « ZEP » ( Zone Education Prioritaire) qui s’est développé dans douze écoles « inter-réseau » de Schaerbeek : commune à forte population d’origine étrangère.
C’est avec beaucoup de motivation et de plaisir que l’animatrice, Catherine Dierick, nous parle de son travail : découvertes de nouveaux auteurs, découpages de romans, lectures vivantes, présentations interactives, petits ateliers d’illustrations à partir d’un bouquin, mises sur pied de pièces de théâtre en collaboration avec les professeurs, invitations d’auteurs : Thomas Lavacherie, Bernard Tirtiaux. Manifestement son apport au sein de l’école est considérable et précieux et ce, à différents égards.
Premièrement, parce que la présence de cette bibliothécaire de formation garantit le lien entre le monde scolaire et celui des bibliothécaires. « La présence d’une animatrice extérieure à l’école est importante dans une structure comme celle-ci car les animations font vivre la lecture à l’école et la bibliothèque. Néanmoins, il est important que je garde ma spécificité et je veux conserver mon étiquette de « non-scolaire ». Les enseignants le savent et collaborent avec moi et il est toujours très agréable de constater qu’un livre que j’ai présenté une année en animation se retrouve sur la liste d’un professeur ! ».
Ensuite, parce que cette animatrice, en relation avec le tissu d’associations culturelles de la commune dans lesquelles elle s’investit également, est vigilante à sensibiliser les élèves au réseau de lecture publique du terrain Schaerbékois. Et cet élément est primordial. « En effet, chaque début d’année, explique Catherine Dierick, je distribue aux élèves et aux parents des informations sur les heures d’ouvertures des bibliothèques publiques de la commune »...

Des interrogations

C’est par cette image de passerelles du monde de l’enseignement vers celui de la lecture publique que nous terminerons le portrait de cette bibliothèque bien ancrée au cœur de l’école mais également vigilante à profiter de son infrastructure pour permettre aux élèves d’aller plus loin.
« C’est exact que c’est une volonté de l’école », conclut l’animatrice.
Néanmoins, celle-ci regrette que des pas ne soient pas faits également dans l’autre sens. « On a l’impression qu’il y a d’un côté les bibliothèques publiques et puis les autres : en tant que bibliothécaire travaillant dans une bibliothèque d’école, on ne se sent pas suffisamment reconnu. Lors d’un colloque auquel j’ai participé dernièrement à Bruxelles, nous découvrions, mes collègues et moi, tout le travail accompli en bibliothèque publique par une animatrice. Notre démarche à nous, en bibliothèque d’école, est similaire mais nous avons l’impression étrange de ne pas appartenir à la même profession ! ». .
Sans aucun doute est-il plus qu’urgent de prendre en considération tout ce travail mené par des bibliothécaires d’écoles, de le valoriser mais aussi et avant tout de répertorier toutes les initiatives existantes dans les établissements de la Communauté française.