Publié le 19 décembre 2016, par
Les chemins pour pénétrer dans l’œuvre d’Anne brouillard sont multiples et variés à l’image de l’important univers onirique qui y sommeille. Présenter en bibliothèque une mise en scène originale de ses travaux afin de permettre à chaque usager, petit et grand, de s’approprier l’ambiance envoûtante de l’œuvre de cette illustratrice belge, ne peut donc s’improviser ! Car ce projet exige un important travail de concertation et d’échanges sur les différentes lectures et interprétations de chaque membre de l’équipe. C’est à cet intéressant défi créateur de liens et de dialogues que s’est attelé l’équipe de la bibliothèque Pierre Perret de Waremme qui, en avril dernier, a accueilli l’exposition "Le pays de Killiok"(1).
Ouvrir un album d’Anne Brouillard, c’est répondre à une invitation pour une promenade balisée d’une riche déclinaison de décors variés et d’ambiances souvent mystérieuses. Et que ce soit au coeur de ses maisons dont elle nous dévoile portes et fenêtres, le long des voies ferrées ou au plus profond de ses forêts ténébreuses habitées parfois de petits animaux complices ; toujours ce riche foisonnement d’images, leur mise en scène souvent envoûtante et le subtil et curieux dialogue qu’elles induisent chez le lecteur. C’est précisément cette importante part d’ouvertures mais également la prépondérance du visuel présent dans l’oeuvre de l’artiste belge qui ont convaincu Véronique Simenon, scénographe de formation et animatrice à la bibliothèque publique communale de Waremme, d’accueillir cette exposition et, en collaboration avec la responsable Marie-Chantal Renson et toute l’équipe, de se l’approprier dans une mise en scène originale source de multiples dialogues.
De dialogue, il en est premièrement question grâce à la présence des planches originales. Pouvoir exposer ce type de support est en effet un grand privilège et constitue, notamment, un des atouts de ces expositions car elles dévoilent, avec une importante authenticité, les lignes de force de l’univers de l’artiste mais aussi induisent, comme par essence, un rapprochement avec les usagers. "Les originaux sont essentiels, explique Véronique Simenon, car c’est un moyen pour nous, bibliothécaires, de permettre à nos lecteurs de mieux entrer en correspondance avec la démarche de l’artiste mais aussi de montrer, qu’au départ du livre, il y a d’abord une page blanche, un simple crayonné, dévoilé, notamment, grâce aux carnets de croquis. Cela démystifie totalement le livre, on ressent sa genèse et l’on se trouve en présence quasi tangible de l’artiste. »
Quant au dialogue induit par le travail d’Anne Brouillard, il continue son cheminement au cœur de la mise en scène orchestrée de façon à proposer différentes portes d’entrées aux visiteurs : que ce soit par le biais du visuel, du toucher ou du sonore ! Pour ce faire, toute l’équipe a échangé sur les différentes lectures induites par les albums ou les originaux. « En préparant ce montage nous avons bien compris, mes collègues et moi-même, que chacun pénétrait dans le travail d’Anne brouillard par une porte qui lui était toute personnelle et nous avons souhaité essayer de transposer ces multiples ressentis lors de la mise en scène de l’exposition. »
Et cette intéressante approche plurielle est concluante ! En effet voici, au cœur de la bibliothèque, un petit espace clos et bien délimité par une entrée curieusement bordée de quelques briques qui donnent l’illusion aux visiteurs de pénétrer dans une maison : celle d’Anne Brouillard… « Les notions d’intérieurs et d’extérieurs sont très présentes dans ses albums et nous avons joué avec ces impressions de va et vient pour moduler l’espace » , poursuit Véronique. Autre métaphore sur laquelle l’équipe a planché, la promenade qui se décline sur fond sonore en résonnance avec l’invitation de l’artiste à se balader mais également flâner. « Une de membres de l’équipe a eu l’idée de placer un banc sur le parcours pour inviter le visiteur à se poser. Une autre a pensé à un fond sonore avec des chants d’oiseaux, mélodieux et paisibles et si représentatifs de son univers. » Autre astuce originale, ce miroir placé en vis-à-vis d’une illustration et grâce auquel le visiteur se trouve visuellement projeté dans le paysage de l’artiste.
Comme on peut le constater, le dialogue induit par une telle démarche semble presqu’intarissable et se poursuit de façon plus concrète encore en impactant la fréquentation même de la bibliothèque qui, grâce à ce type d’exposition, accueille un public moins habituel. « Bien sûr, une exposition permet de parler aux usagers traditionnels mais également à de nouveaux visiteurs, poursuit l‘animatrice. Parfois des personnes souffrant d’un handicap ou des groupes de personnes défavorisées. Tout ce public très diversifié en soif d’échanges se sent accueilli et une telle proposition d’activité les aide à pousser notre porte et à ressentir que la bibliothèque est, plus que jamais, un lieu de découvertes » Grand ouvert sur un subtil va et vient entre intérieur et extérieur…
(1) « Le pays de Killiok - A quoi rêve Anne Brouillard » : Une exposition du Service Général des lettres et du Livre conçue par Le Wolf et les Ateliers du texte et de l’Image asbl.
La revue Libbylit vient de consacrer, avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles, un hors-série entièrement consacré à cette artiste emblématique, lauréate du Grand Prix triennal de Littérature de Jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2015.
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