Portrait

Le Centre de doc’ de Lezarts Urbains à Saint-Gilles. Un carrefour de ressources et de valorisation des cultures urbaines.

Publié le 23 août 2017, par Sylvie Hendrickx


Pousser les portes de ce centre de documentation, c’est découvrir…

Une association active

Slam, rap, danse hip hop, graffiti, beatbox… des mots qui respirent la culture urbaine et sur lesquels il est parfois malaisé de mettre des images précises tant cet ensemble de disciplines reste encore malheureusement peu connu de certains ! Dans un tel contexte, soutenir cette culture est primordial ! Telle est la mission de l’association Lezarts Urbains qui, par le biais d’accompagnement de projets artistiques, d’organisation d’événements, formations et animations sur le territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles, travaille à valoriser ces modes d’expression souvent originaires de milieux populaires. Dans une telle optique, posséder un centre de documentation est une évidence ! D’autant plus quand celui-ci se veut le carrefour de multiples ressources mais aussi le point de rencontre entre, d’une part, les adeptes de cette culture et, d’autre part, les publics diversifiés d’une bibliothèque. C’est précisément au coeur de la bibliothèque de la commune de Saint-Gilles, zone de Bruxelles où la culture hip hop est très présente, que ce centre de documentation s’est installé et ce, il y a tout juste quinze ans ! Au quatrième étage, dans le prolongement de l’espace « ado », un mystérieux volet graffé aux couleurs vives et aux motifs urbains appelle le regard. Il couvre un pan de mur de la bibliothèque où se dévoile, deux après-midi par semaine, le dense rayonnage du centre documentaire. Une table spacieuse invitant à la consultation et un coin plus cosy avec des « poufs » verts et mauves constituent l’ensemble du mobilier de cet espace qui s’intègre parfaitement dans l’environnement en bois clair de la bibliothèque tout en s’en distinguant par ces audacieuses touches de couleur. Maud De Craeye, chargée de missions au centre documentaire, nous accueille dans ce lieu atypique et... ouvert sur la bibliothèque.

Un fonds spécifique et varié

Unique en son genre, le centre de documentation propose un fonds visant à couvrir l’ensemble des disciplines qui, au sein des cultures urbaines, appartiennent plus particulièrement au mouvement hip hop – à savoir le rap, le d.jaying, le break dance et le graffiti. « Nous ne pouvions pas nous consacrer à l’entièreté de la culture urbaine car ce terme recouvre des réalités très diverses », explique Maud De Craeye. Le centre a cependant décidé d’opérer une ouverture claire, en dehors des quatre disciplines hip hop, vers les domaines d’expression que sont le slam et le beatbox. » Au fil des années, le centre a ainsi constitué un fonds riche en ouvrages de référence, essentiellement francophones, et propose à la consultation une série de DVD documentaires et une sélection de CD de rap belge pour s’immerger dans la riche production de ce courant culturel. Une collection de magazines spécialisés et un important travail de revue de presse lui permettent également de se poser en témoin de l’histoire et de l’évolution de ce mouvement.

Une intégration réussie

« Notre implantation au cœur de cette bibliothèque n’est pas un hasard, souligne par ailleurs Maud De Craeye. Le centre de documentation est, à la base, un projet pilote visant à amener le public hip hop au sein des bibliothèques. » Dans cette optique, le quartier Saint-Gilles s’est imposé de par sa proximité avec les bureaux de l’association mais également du fait de la vitalité du mouvement hip hop dans cette zone de Bruxelles. Sans compter l’accueil très favorable de la part des bibliothécaires du lieu ! « La grande ouverture d’esprit et la flexibilité de nos collègues bibliothécaires rend la synergie très concluante ! Il nous arrive d’organiser des événements en commun et nous nous sentons pleinement écoutés dans nos demandes et nos besoins. » Et pour preuve, l’espace supplémentaire repris sur le rayon ado pour permettre à Maud De Craeye et Catherine Wielant, responsables du centre, de proposer à l’avenir des projections de documentaires.

Un lieu de consultation

En raison du caractère précieux de ce fonds, qu’il s’agisse par exemple de beaux livres sur le graffiti ou de CD diffusés en petits tirages et déposés par des artistes, le centre se veut essentiellement un lieu de consultation. « Nous n’octroyons pas de prêt excepté pour des projets très spécifiques comme des expositions. Cette politique découle de l’impossibilité, pour des raisons budgétaires et de stockage, de disposer de double au sein de notre fonds. » Ici aussi cependant, la synergie avec la bibliothèque s’avère fructueuse et une signalétique permet de repérer les livres achetés parallèlement par la bibliothèque et que les usagers du centre peuvent emprunter.

Des outils pédagogiques

Les chargées de missions veillent également à faire vivre et rayonner leur fonds au travers d’organisation d’événements tels des expositions et des spectacles mais aussi des animations documentaires et des modules d’activités proposés notamment en milieu scolaire. « La documentation riche dont nous disposons nous permet d’être très créatifs ! », se réjouit Maud De Craeye. Le centre de documentation a ainsi créé une série d’outils d’animation dont quatre mallettes pédagogiques consacrées chacune à un grand axe de la culture hip hop : la danse, le rap et le graffiti mais aussi le slam/spoken word. Celles-ci sont composées de supports variés tant par le contenu que par la forme (livres, dossiers, manuels méthodologiques, supports audio et vidéo…) et sont empruntables gratuitement pour une période de 12 semaines maximum. De quoi permettre la mise sur pied de riches projets au long cours !

Des productions « maison »

Le centre de documentation entend également remplir un rôle d’expert dans son domaine. En effet, les chargées de missions s’emploient à accompagner leurs usagers dans leurs recherches et travaux mais également à réaliser des créations « maisons » originales destinées à combler certains manquements en termes documentaires. Ainsi par exemple le DVD Mauvaises Herbes réalisé par Catherine Wielant, responsable du Centre de documentation, et Catherine Vercruysse de l’asbl Fais le trottoir qui permet de découvrir l’univers méconnu du tag urbain au cœur de Bruxelles.

Des artistes ressources

Enfin, le centre documentaire se veut un relais entre la demande des usagers et les artistes ou animateurs susceptibles d’accompagner leurs projets (ateliers d’écriture…) Une réalité qui amène Maud De Craeye à observer que l’objectif initial du projet pilote s’est quelque peu inversé mais d’une manière tout à fait intéressante. « Les acteurs du mouvement n’ont pas été très nombreux à venir à la bibliothèque en tant qu’usagers tout simplement parce qu’ils ont le sentiment de déjà connaître les codes de cette culture à laquelle ils s’identifient et ressentent moins le besoin de se documenter. Ils se sont par contre vraiment intégrés au fonctionnement du centre en tant que personne ressources sollicitées pour participer à telle ou telle animation à destination d’autres publics"

La transversalité des actions

De cette variété de missions résulte une importante diversité des publics, avec cependant une forte fréquentation des acteurs du milieu scolaire qu’il s’agisse d’enseignants ou d’étudiants. « Nous avons assisté ces dernières années à une importante mutation. Les animations hip hop et les ateliers d’écriture slam étaient au départ principalement demandés dans les maisons de jeunes ou les écoles au public un peu plus compliqué. Aujourd’hui, le slam est considéré de manière positive dans tous les milieux, y compris les plus académiques. » Une forte demande qui incite les chargées de missions à rester vigilantes. « Nous devons veiller à ne pas nous enfermer dans l’offre scolaire. Tout l’intérêt de notre centre est justement de rester dans une tension bénéfique et fructueuse entre éducation permanente et culture artistique. » Elles sont ainsi particulièrement attentives à accueillir et encadrer les nombreuses personnes issues des domaines associatifs (centres culturels, maisons de jeunes…) ou du domaine artistique désireuses de se documenter sur le mouvement hip hop. « Nous avons la chance de fréquenter un public aux profils très diversifiés qui vient vers nous avec des projets spécifiques. Ce sont à chaque fois des rencontres uniques et très enrichissantes », confie Maud De Craeye en conclusion du portrait de ce centre aux missions et ressources tout en ouverture et transversalité !

Sylvie Hendrickx

Le Centre de documentation Lézarts Urbains
Rue de Rome 24
1060 Bruxelles
02/538.15.12
www.lezarts-urbains.be