Regards croisés sur

Mille soleils splendides

Publié le 26 août 2008, par Gérard Durieux


Une description noire et minutieuse d’un chaos politique et des mille violences quotidiennes infligées aux femmes, fort heureusement pondérée par des pages lumineuses où rutilent des trésors d’amour, de tendresse et de promesse pour l’avenir de la terre afghane.

HOSSEINI Khaled, Mille soleils splendides, Belfond, 2008

Fils de diplomates afghans émigrés aux Etats-Unis, ce médecin né à Kaboul en 1965 porte en lui la blessure de son pays malade de guerres intestines et de traditions religieuses étouffantes.

De cet amour meurtri naissent des œuvres de grande humanité, de colère et d’espoir.

Entre trahison et pardon, les avatars d’une amitié d’enfance sur fond d’occupation soviétique, de rivalités ethniques et de terreur talibane décrits dans Les cerfs-volants de Kaboul , avaient enchanté les lecteurs du monde entier. De ce récit émouvant, un film, assez fidèle paraît-il, vient d’être réalisé.

L’habile romancier nous revient avec l’histoire de deux femmes, Mariam et Laila. Celles-ci sont victimes des mille brutalités d’un machisme borné et despotique :
« Une dernière fois, Mariam fit ce qu’on lui ordonnait ». Car c’est ainsi que les femmes vivent. L’évocation minutieuse de trente ans de chaos politique et des implacables violences quotidiennes, nous conduit de l’incrédulité à la consternation, de l’accablement à la révolte.

Mais tout l’art d’Hosseini tient dans le contrepoint d’une autre musique : celle d’un double amour. Celui qui lie ces êtres d’intensité et de faiblesse : pères et mères, fils et filles. Liens subtils et complexes, trésors de tendresse par quoi le malheur est obstinément conjuré. Par quoi aussi le pays bien aimé survit et tient debout. Car ces pages sont aussi un hymne à la terre afghane amoureusement décrite et à la ville chérie, Kaboul.

Une promesse ouvrait et fermait le premier roman : « Pour vous, un millier de fois ». Celui-ci décline les vers d’un poème de Saib-e-Tabrizi (XVII°s) sur Kaboul : « Nul ne pourrait compter les mille soleils splendides qui se cachent derrière ses murs ».

Mille raisons de s’émerveiller avec tous ses enfants de la richesse humaine de cette terre de culture et d’espérer en l’avenir de ce pays dévasté. Mille raisons de remercier l’auteur pour ce texte d’émotion.