La Célestine, bibliothèque communale de Namur

Publié le 31 mars, par Chloé Geron


Un tiers-lieu accessible et émancipateur

À deux pas de la gare de Namur, se dresse en angle, tel un livre entrouvert qui nous attire en nous montrant son dos de carrés vitrés, la fameuse Célestine, la nouvelle bibliothèque communale de la Ville de Namur, une implantation moderne tournée vers son public, invité à en parcourir les pages.
 
 
 
 
 
 
 

Préambule

Arrivées à l’accueillant, bien qu’imposant, bâtiment historique de cette bibliothèque ancrée dans son temps, nous pénétrons par une grande arche de pierres, une des traces conservées du corps de garde de l’ancienne caserne qui ont été intégrées dans la nouvelle conception architecturale, et modernisée par ses portes automatiques en verres, notamment. À notre droite, le Musée africain et son Centre de documentation ; à gauche la tant attendue nouvelle implantation…
 
 

Chapitre Ier : une page se tourne…

Après septante années de bons et loyaux services initiés en 1954, l’implantation de la Venelle des Capucins, qui n’entrait plus suffisamment en résonnance avec les missions de la Lecture publique du XXIe siècle, a fermé ses portes, mais, heureusement, le récit ne s’arrête pas là.

En 2024, la saga des Bibliothèques de Namur Capitale, (ne dites plus « Réseau namurois de Lecture publique » !), parées d’un nouveau logo, se prolonge d’un nouveau tome, celui du CEntre de LEcture et de Savoir TechnologIque de Namur, plus communément appelé sous sa forme féminine « La Célestine », dont le nom rappelle à juste titre la place où elle s’implante. Une dénomination qui semble toute trouvée, mais dont l’origine relève cependant d’une dynamique collaborative…

En effet, le projet ne pouvait se faire sans la contribution des habitant·e·s eux/elles-mêmes, habitué·e·s des implantations namuroises ou futur·e·s usager·e·s. À l’instar de la législature namuroise qui a mis la participation citoyenne au cœur de ses projets de ces dernières années, l’équipe de bibliothécaires est persuadée qu’un nom clair, choisi et validé est plus vite adopté. Ainsi, les citoyen·ne·s sont interpelé·e·s et invité·e·s par les médias, les canaux officiels, des flyers et stickers, via la Plateforme namuroise du social et au sein d’associations, à proposer puis à choisir cette appellation.

Parti pris consultatif qui se prolonge encore dans l’aménagement intérieur qui vit se concilier les recommandations de l’architecte de la Ville, l’avis des bibliothécaires ainsi que l’expression des attentes de la population namuroise, recueillies par l’installation de « parasols à paroles » dans de nombreux lieux de vie (marchés, festivals, bibliothèques, Hôtel de ville, associations, UNamur, etc.). Ainsi, ont émergé, par exemple, les désirs de bénéficier d’une ludothèque, d’espaces de travail et d’assises différentes selon les usages privilégiés des différentes tranches d’âges représentées au sein du public de La Célestine.

Un déménagement qui a, par ailleurs, tôt fait de rassurer les inquiet·e·s et de convaincre les usager·e·s et les Namurois·e·s … En effet, conçue comme un tiers-lieu inscrit en plein cœur d’un nouveau projet de quartier mixte à la croisée de lieux de culture et d’apprentissage (le Namur Concert Hall, le Conservatoire Balthasar-Florence, des écoles secondaires et d’enseignement supérieur, etc.), desservi et accessible par tous les moyens de locomotion, ce second chapitre entamé en a intrigué plus d’un. Cependant, La Célestine s’est voulue particulièrement attentive au phénomène de gentrification, résultat de la rénovation du quartier. Ainsi, l’ouverture de la nouvelle implantation a été coordonnée en partenariat avec le Cinex, asbl sociale de dynamisation du quartier, afin d’impliquer aussi les habitant·e·s des rues avoisinantes. De même, la qualité des collections et la présence d’ordinateurs furent un pôle d’attractivité pour le public adolescent. Le taux de fréquentation de l’implantation a d’ores et déjà triplé et a atteint un premier record, un mercredi de novembre, avec 891 visiteurs.
 
 

Chapitre 2 : un pour tous, tous pour un

À Namur, les implantations en Lecture publique sont pensées comme les différents volumes d’une même série littéraire. Chacune (Namur, Jambes, Saint-Servais, Malonne, Le CeRHIN, Flawinne, La Baie des Tecks et la Bibliothèque du Patrimoine souterrain) présente ses caractéristiques propres et, pour certaines, des objectifs particuliers (le CeRHiN [1], spécialisé en fonds patrimoniaux, la Baie des Tecks en BD, la Bibliothèque du Patrimoine Souterrain en spéléologie), mais toutes avancent ensemble dans une même dynamique d’actions. Ainsi, certaines activités se déroulent-elles en parallèle dans plusieurs implantations (comme l’Heure du conte ou certaines animations de type plus scolaire).

Mais une étape paraît cruciale pour la FIBBC : l’intégration dans le Réseau namurois de Lecture publique de la bibliothèque — si riche de documents — du Séminaire, tel que souhaité par le bourgmestre de la capitale wallonne, M. Maxime Prévot. Ce processus, dans une dynamique ascendante, est appelé à trouver son échéance à la faveur de l’acceptation du renouvellement de la reconnaissance de ce Réseau renforcé.

Le personnel dudit Réseau, composé de 31.7 ETP et de nombreux volontaires dans les filiales sous statut d’a s b l, circule entre les différents établissements, soutenu également par les services de la Ville (notamment informatiques), le tissu associatif local (pour la médiation numérique) et par la bibliothèque provinciale dite opérateur d’appui, décentralisée à Naninne, qui gère le catalogue partagé Tire-Lire. La navette du prêt interbibliothèques (interne au Réseau) sillonne la commune deux fois par semaine ; le catalogage des ouvrages des bibliothèques de droit privé du territoire s’effectue à La Célestine. Entre l’exigence législative d’un catalogue unique et le financement par la Ville des collections acquises, l’objectif final est de parvenir à mettre en place une circulation telle qu’il sera possible pour tout·e usager·e d’emprunter un ouvrage dans l’implantation de son choix et de le ramener dans une autre, optimisant ainsi la mutualisation des services.
 
 

Chapitre 3 : où sont Ernest et Célestine ?

Dans le large couloir d’entrée où nous attendons Catherine de Biourge, accueillante et dynamique cheffe du service « Bibliothèques » au Département Culture et Loisirs de la Ville de Namur, nous avons tout le loisir d’observer le ballet incessant d’usager·e·s, déjà autonomes dans l’utilisation des bornes de prêts et de retours. Et pour les novices, il se trouve toujours, à proximité, du personnel d’accueil disposé à accompagner, au besoin, ce processus de plus en plus commun.

Notre hôte du jour arrivée, nous débutons cette plaisante visite, riche d’informations professionnelles. Sur la droite, deux espaces polyvalents, habillement nommées « Point » et « Virgule », enrichissent le potentiel d’activités de médiation : expositions, animations, concerts, pratiques en collectif, mais toujours en filigrane, l’écriture et la lecture qui constituent l’âme de cet endroit où aucun jour ne ressemble à un autre et où l’« ultra polyvalence » des bibliothécaires est une nécessité, nous assure Catherine de Biourge.

En face, l’« Espace Jeunes » se déploie à 180°, illuminé par de grandes vitres et agencé de manière multiple, des bacs à portée de petites mains aux étagères design. Et en plein cœur de ce charmant espace et ouvert sur la bibliothèque grâce à ses parois transparentes, la « Cabane de Mariette », lieu de rendez-vous des classes et des Heures du conte, prises en charge par les bibliothécaires ou des conteur·se·s invité·e·s. Les groupes et familles y bénéficient d’un moment privilégié, accessible à toutes et tous, mêlant parfois oralité et interprétation en langue des signes, sans réservation, afin de faire tomber les barrières culturelles et correspondre à l’esprit de celle qui a donné son nom à cet endroit. En effet, Mariette Delahaut a marqué l’histoire de Namur d’une empreinte indélébile par son action en faveur, entre autres, de l’inclusion et de l’accès à la lecture et à la langue française. Dans cet espace aux couleurs sylvestres, les enfants croiseront peut-être l’intemporel duo formé par l’ours Ernest et la souris Célestine…

Nous abordons alors une première volée de marches, à la suite de notre narratrice du jour, et remarquons, là aussi, l’attention accordée à la diversité et à l’inclusion. Du plan des étages jusqu’à la signalétique et l’aménagement des toilettes ou la présence discrète d’un ascenseur, tout a été pensé pour être accessible et sensibiliser à la malvoyance, la diversité de genre, la maternité, etc.
 
 
 
 
 
 

Chapitre 4 : 1001 aventures…

Nous parvenons alors, dans l’ancien corps de garde, à la Ludothèque qui nous dévoile deux nouveaux espaces. Un premier dont la disposition et l’ameublement invitent les familles aux plus jeunes enfants à s’installer sur de petites chaises et tables colorées. Le second, « l’Espace Houyoux », donnant sur la rue, propose de plus grandes tables propices au déploiement de jeux de plateau. Les familles et les groupes y jouent sur place, afin de favoriser le lien social, les mercredis après-midi et samedis matin, encadrés par l’équipe de bibliothécaires formés à la ludothéconomie. Par ailleurs, le collectif alpha, pour qui l’appropriation des langues et le tissage des interactions sociales vont de pair, trouve également ses marques dans ce lieu où l’on accorde une place particulière à l’inclusion, priorité inscrite dans le PQDL [2]. Ainsi, Namur étant un point d’ancrage important pour les personnes issues de l’immigration (centres d’hébergement, classes MENA [3], etc.), un membre du personnel s’est investi plus globalement dans une formation de trois mois en vue d’adapter la dynamique d’accès et les collections d’ouvrages : fonds-rayon FLE, grammaire, pédagogie, lecture facile à proximité des bureaux d’accueil pour la médiation directe. Juste à côté de la Ludothèque, l’ « Espace Casernes » constitue une pièce supplémentaire qui peut aisément servir de salle d’étude ou de réunion.

Nous montons enfin au premier étage de ce bâtiment dont les nombreuses portes invitent à autant de nouvelles aventures passionnantes. L’Espace Adultes paraît alors devant nous avec ses collections dont l’organisation et la CDU ont été entièrement repensées pour obtenir un classement par thématique-matière ayant chacune un·e seul·e gestionnaire pour l’ensemble des implantations communales. Travail bien nécessaire qui a permis d’anticiper le manque de place et de procéder à l’oxygénation et la rationalisation des collections sur le territoire, avant le déménagement vers La Célestine. Le réseau namurois peut ainsi proposer des dépôts de sélections d’ouvrages accompagnés d’une médiation adéquate aux opérateurs de terrain que sont les crèches, maisons de repos, écoles diverses, collectifs alpha, etc.

Un tour par la grainothèque en libre-service, au creux du rayon consacré à la nature, et nous voilà perchées au sommet de la Mezzanine consacrée à la consultation des revues et journaux avec une vue plongeante sur l’Espace Adultes, rendue accessible par un gradin en bois sur lequel lecteurs et lectrices s’installent librement.

 
 
 
 

À suivre…

Après les Capucins, c’est à La Célestine d’écrire son histoire. Tournée vers l’avenir et ses mutations, la bibliothèque l’est assurément, déjà engagée dans de nombreux projets et référencée depuis peu comme « Safe place », permettant de recevoir et d’orienter les victimes d’harcèlement et d’agressions en rue. Elle envisage également une ouverture en Open+ (tranches d’heures sans présence du personnel), un projet PECA intersectoriel en lien avec la lecture et l’écriture, le défraiement du plus possible de partenaires locaux et la participation à l’enquête Sentobib visant l’analyse des publics touchés par les bibliothèques en Europe.
Les prochains chapitres de La Célestine connaîtront encore bien des rebondissements, c’est certain…

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La Célestine - Bibliothèque communale
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